lundi 10 décembre 2012

REVIEW II / DECEMBRE 2012


Les périodes de fêtes et les anniversaires sont toujours l’occasion pour injecter un peu de botox dans les chairs putréfiées de vieilles gloires d’antan, histoire de faire gonfler le chiffre d’affaires de majors déjà bouffies et obèses. On réédite donc le coffret officiel de luxe du Velvet Underground pour fêter leurs 40e anniversaires avec la banane de Warhol pour étendard. L’histoire d’une oeuvre d’art devenue un simple logo, sorte d’accomplissement pour le publicitaire artiste.
Je ne reviendrais pas sur le Velvet Underground mais plutôt sur un groupe «the Subsonics» qui fait revivre l’esprit des New-Yorkais dans un anonymat angoissant et l’initiative du label de John Dwyer (Thee Oh sees) Castle Face Records.

The Subsonics (Slovenly Records) - In the Black Spot

Les Subsonics sont un trio mixte d'Atlanta et viennent de commettre leur 7ème LP sur le label Slovenly Records. Ne jamais avoir entendu parler de cet excellent groupe alors que j’anime depuis 10 ans rock à la casbah me navre un peu. Pourquoi la qualité trouve aussi peu d’écho dans notre vaste monde. Après moult recherches le constat se poursuit, The Subsonics n’a pas de site à jour depuis 2008, à peine une ou deux chroniques dont une en Hollandais. Autant dire qu’aujourd’hui je vous ouvre la porte d’un grand groupe que la masse ignore.
The Subsonics sont plus qu’une pâle copie de la clique à Lou Reed, il convoque les esprits de Bo Diddley, The Cramps et du Velvet Underground sur l’album «In the Black Spot», sorte de condensé fragile et sans prétention de rock’n’roll garage sous tension new-yorkaise. La voix de Clay Reed (comme c’est bizarre) est certes moins magnétiques mais elle garde cette tonalité nasale et abimée, les ambiances sont noirs et oniriques portée par la guitare riche en réverbération et les cymbales omniprésentes de Buffi Agüero. Plutôt que de perdre votre pognon pour un coffret sans grande nouveauté, ruez-vous sur cette petite merveille sortie sur un petit label indépendant et honnête comme Slovenly record.



Velvet Underground (Castle Face Records) - Velvet Underground and Nico by Castle Face and friends

Autant vous dire que cette initiative n’a absolument pas besoin de nous pour se vendre. Avant même sa sortie officielle tous les vinyles étaient vendus et les demandes de repressage en cours. Voilà, une autre manière de fêter le quarantième anniversaire des new-yorkais tout en découvrant la nouvelle scène rock garage de la côte-est américaine. En gros, c’est un peu ce que devrait faire nos chère magazine plutôt que de consacrer un ènieme dossier au groupe. Avec cette compilation vous découvrirez donc The Mallard, les excellent Warm Soda né sur les cendres encore fumantes des Bare Wires sous la houlette de Matthew Melton, la pop chatoyante des White Fence ainsi que l’énergie juvéniles des Blasted Canyon.
Cet objet est également l’occasion de retrouver les têtes de pont de la scène californienne en la personne de Ty Segall et Thee Oh Sees. Ne d'espérer pas si vous n’arrivez pas à mettre la main sur ce disque car vous pourrez vous consoler avec les titres mp3 qui circulent en libre téléchargement sur la toile. On peut quasiment reconstituer l’album avec un peu de flaire et de patience.
 

vendredi 7 décembre 2012

REVIEW I / DECEMBRE 2012

METZ - METZ (Subpop Records)

Subpop veut vous faire passer un sale hiver, vous donner la rage et l'envie de taper tout ce qui est fragile et encore innocent. Oui car avec la sortie d'un album comme celui des canadiens de Metz il va falloir avoir les nerfs solides. Surplus de guitares sur une toile de fond grise et froide, les compos de Metz font rarement dans l'attendrissement. On pense à The Bronx avec un peu plus de matière grise. En effet si le registre est souvent agressif et les tonalités cinglantes, la production de l'album, elle, respire d'une certaine profondeur. Comme un bon bouquin, l'album possède une réel ligne directrice qui vous feront plonger dans les abysses. A la colère s'ajoute une hypnose convaincante, ce qui montre comment le groupe arrive à sortir de ses registres post-punk / hardcore pour céléber quelque chose d'unique. On languit de voir le groupe se défendre en live, mais selon le maitre youtube, le trio transforme l'épreuve de la scène en quelque chose de plus rock'n'roll.   En gros un album ultra bien fait, qui à l'inverse de la cheminée, ne vous réchauffera pas le coeur.


BARE WIRES - Idles Dreams (Southpaw Records)

Comment entamer ce papier sans parler de la fin tragique des Bare Wires lors du dernier festival d'Austin le SXSW. Soyons honnête, je n'avais jamais écouté Bare Wires malgré quelques chroniques positives de leurs précédents albums. Un peu saturé par l'invasion pop garage Lofi de la côte Est, je ne m'étais jamais penché sur le trio d'Oakland. Idles Dreams est un album posthume et sa qualité finira de casser le moral des fans. Je débute donc mon apprentissage de la Bare Wires attitude par la fin. Je ne suis pas allé jusqu'à enfiler des chemises à fleurs, à me laisser pousser les cheveux tout en peignant avec soin une moustache drue. Je me suis contenté de leur musique. La première écoute ne m'a pas emballé, une voix faiblarde, des guitares sans riffs avec des passages aux mélodies pleines de guimauve. J'aurais dû passer à coté de ce disque mais je ne sais pas pourquoi, je l'ai remis dans ma platine une seconde fois. Les mélodies d'Idles Dreams" où l'excellent "psychic winds" ont commencé à s'impregner et l'envie de les fredonner se sont imposées. Les Bare Wires se démarquaient de la scène californienne, œuvrant dans une veine glam-punk légère plutôt que le garage psychédélique des Oh Sees et Ty Segall. Sur ce disque rien n'est agressif, la voix est feutrée, douce quasi nostalgique et les guitares soutiennent avec discrétion les envolées pops du trio. Addictif et génial, laissez à cet album le temps d'infuser et ensuite savourer. Ci dessous vous trouverez le clip de "School Day" qui en première écoute peut paraitre mièvre mais qui finit par être un titre d'une nostalgie folle que l'on aime à entendre.



samedi 1 décembre 2012

INTERVIEW - Reverend Beatman (fondateur de Voodoo Ryhthm Records)

English version at the bottom page





Qui était Lightning Beatman?

Lightning Beatman, c’était un alter ego. Je suis Beatman Zeller, de Bern en Suisse. Dans les années 80 90, j’ai découvert le catch mexicain (lucha libre) et me suis acheté un masque de combat. Une fois sur scène j’étais ce one man band, je me battais contre moi-même, et je gagnais à chaque fois! (rires) ce masque se nourrissait de ma personnalité, devenait de plus en plus taré, et après dix ans de Lightning Beatman mon corps était complètement ravagé, et là j’ai dû changer de nom pour  Reverend Beatman.



Comment et pourquoi est-ce que Lightning Beatman est devenu le Reverend Beatman ?
Ben oui c’est pour ça. Ce personnage de Lightning Beatman était bien trop noir, trop malsain, et j’ai du m’en débarrasser. (rires)

Est-ce que le Reverend Beatman a une mission particulière sur Terre ? Avec la musique je veux dire ?
Oui bien sûr, c’est l’amour ! (rires) J’aime l’amour. Y a rien de mieux.

Alors, Lightning Beatman, Reverend Beatman et Beatman Zeller, ce sont des personnages différents?
Eh bien, c’est toujours moi ! Chacun a plusieurs personnages en soi. Sur scène, je décide lequel je veux interpréter. Mais tous ces personnages font partie de moi, je les lâche sur la scène, mais tout ça, c’est moi.

Et tu ne veux plus utiliser ton masque de combat...
Je ne ressens plus le besoin de me cacher derrière un masque. C’est très facile de porter un masque, on peut explorer plein d’aspects de soi-même sans jamais se découvrir vraiment. C’est extraordinaire comme expérience de se cacher derrière un masque, de péter un câble, devenir dingue et se mettre à nu… Je n’aurais jamais pu faire ça sans le masque ! Mais maintenant je n’en ai plus besoin…




A propos du label, Voodoo Rhythm Records, quand est-ce que ça a commencé ?

Ça a aussi commencé dans les années 80, je travaillais à l’époque pour un label et magasin de disques qui s’appelait Record Junkie. J’avais déjà une petite cassette pirate. Donc dans les années 80, avec Record Junkie Records, j’apprenais un peu comment fonctionnait un label, et puis en 1992 j’ai sauté le pas et j’ai créé le label Voodoo Rhythm Records.

Dans quelle mesure est-ce que tu arrives à soutenir des groupes peu connus, et qui ne te rapporteront probablement jamais d’argent ?
En fait c’est vraiment de ça dont’il s’agit. Quand j’étais en tournée dans les années 80 90, il y avait tellement de groupes qui ne trouvaient pas de label ! Et moi, je voulais un de leurs disques pour ma collection, parce que je suis collectionneur de vinyles ! Alors la seule façon d’avoir un disque à eux dans ma collection de vinyle c’était de leur sortir un disque ! J’ai vraiment créé ce label parce que je voulais avoir des vinyles de ces groupes que j’adore. Et c’est toujours ce que je fais ! Je reçois des démos, je vois des groupes, les autres disent « oh là c’est complètement dingue ! » et en général je fonce (rires).

Justement, est-ce que Voodoo suit un genre de fil conducteur, comment est-ce que vous choisissez vos groupes, est-ce que c’est une question de style, ou plutôt de rencontres… ?
Ah, mon fil conducteur, je pense, c’est justement qu’il n’y en a pas. L’authenticité des musiciens, c’est ça qui compte. Ce sont tous des gens géniaux, qui écrivent de super chansons, mais après, le style musical, je m’en fous, s’il y a une ou dix personnes dans le groupe, je m’en fous, qu’ils fassent du jazz, du rock, du punk, du blues, ça m’est égal. Si c’est de la bonne musique, alors ça m’attire, et j’ai envie de les avoir sur mon label. C’est un peu comme d’être dans un marché aux puces et de chercher quelque chose sans trop savoir quoi, et qu’une fois qu’on l’a trouvé, on le veut absolument. C’est un peu pareil.

J’imagine que beaucoup de gens viennent te voir pour te demander de sortir un album ? 
Oui, oui beaucoup de gens viennent me voir.

Et est-ce que ça marche ?
Oui, parfois ça marche, mais c’est vraiment difficile pour moi car je ne veux décevoir personne. Si quelqu’un commence à jouer de la guitare et à enregistrer sa propre musique, c’est déjà super ! Et c’est très dur pour moi de lui dire que je ne vais pas sortir sa musique sur Voodoo Rhythm Records, même si je la trouve géniale ! Selon moi c’est ce qu’il y a de plus difficile dans la gestion d’un label. Il n’y a pas un style de musique Voodoo Rhythm Records en particulier, c’est juste une histoire d’émotion, de sentiment. Ce n’est pas mon cerveau qui me guide vers un artiste ou un autre, c’est autre chose, qui ne me laisse pas le choix, il n’y a rien de personnel, pour ou contre tel ou tel musicien. Si je ressens cette émotion, alors il faut que je le fasse, c’est tout. C’est ma passion. 

Est-ce que Voodoo Rhythm veut s’agrandir ?
Ah, oui bien sûr qu’on veut ! Plus c’est gros mieux c’est hein ! (rires) On aime bien ce qu’on fait en ce moment, mais je pense qu’il y a tellement de monde sur cette planète, des milliards de personnes. Et dans ce que la musique grand public leur apporte, il n’y a aucune créativité, et ça n’amène les gens nulle part. Moi, je veux que la musique soit créative, différente. Quand on allume la radio, ils passent toujours les dix mêmes musiciens, 24 heures sur 24 ! Alors qu’il y a tellement de diversité musicale dans le monde, entre l’Afrique, l’Arabie, l’Amérique, la Suisse, la France, etc. Chacun fait quelque chose de différent, et ils sont tous talentueux, leurs chansons sont vraiment bonnes ! Pourquoi est-ce qu’ils ne passent pas à la radio ? Ça, ça ouvrirait un peu l’esprit de tout le monde sur Terre. Ça, ça changerait le monde pour toujours, si beaucoup de gens écoutaient cette musique, et si ces mêmes personnes s’intéressaient à cette musique. Dans nos cerveaux, il y a de la place pour tellement de diversité, de complexité, et pourtant on nous donne si peu ! Ce n'est pas juste (rires).


Quelles sont vos prochaines sorties sur Voodoo Rhythm Records ?Alors en ce moment, on prépare la sortie d'Hank Haint, c’est un one man band d’Angleterre, c’est génial. Non, en fait c’est vraiment super-génial. Et puis en septembre on va sortir Becky Lee & Drunkfoot, c’est une fille qui vient de l’Arizona, c’est un one woman / girl band et elle est époustouflante. Le milieu du blues est vachement dominé par les hommes, et puis il y a cette femme qui débarque de Tempee en Arizona, et c’est un vrai orchestre à elle toute seule. C’est du blues, un peu du desert blues. Les chansons qu’elle écrit et qu’elle chante aussi sont impressionnantes, ce sont toutes des histoires complètement déjantées de sa vie à elle. L’histoire de sa vie est dingue, et tout est dans sa musique, c’est vraiment très beau. Et puis en octobre, on va sortir les Heart Attack Alley, c’est un groupe néo-zélandais, deux filles et un gars, c’est aussi plutôt blues, et c’est aussi très très bon.


Il y a quelques années, vous avez eu des problèmes avec la SACEM, et Voodoo Rhythm a été menacé de fermer, est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur ce qui s’est passé et sur les manifestations de solidarité qui ont en ont résulté ?

Je tiens un petit label, comme plein d’autres, et il y a les droits d’auteurs : la SACEM, SUISA… Il y a des tonnes de sociétés de gestion des droits d’auteurs, et ça c’est une bonne chose, car elles soutiennent les musiciens et se soucient de leur situation. Mais je leur versais tellement d’argent, alors que les groupes ne touchaient rien, que j’en ai eu marre, et j’ai arrêté de les payer et je donnais l’argent directement aux groupes. A la place d’argent, je leur donnais des disques, plein de vinyles de groupes que je sortais. C’était parfait pour moi et pour les groupes, mais bien sûr les sociétés de gestions des droits d’auteur, ça ne leur a pas plu du tout. Alors j’ai été poursuivi en justice pour 50, 60 millions de dollars, et je ne pouvais pas payer ! Alors j’ai lancé un appel sur internet « à l’aide, Voodoo Rhythm Records est menacé de fermer ». Et des gens, de partout sur la planète, m’ont envoyé de l’argent, ont organisé des concerts dont les bénéfices étaient reversés à Voodoo Rhythm, et au final j’ai pu payer ! C’était dingue. Quand on tient un label, et qu’on est chez soi, devant son écran d’ordinateur, on ne se rend pas compte du nombre de contacts que l’on crée avec les gens qui achètent nos disques. Et en faisant ça, on obtient tellement de réactions, c’est dingue. Nous, on s’est rendu compte qu’on créait quelque chose que peut être les gens aimaient vraiment. Et ce qui leur plait c’est qu’on fasse quelque chose de différent, et qu’on ne se limite pas à un style mais qu’on s’intéresse à tous les styles musicaux, et la musique qu’on sort est différente, elle est bizarre… Ca nous a vraiment bien aidés. Mais bon, maintenant, on paie l’argent qu’on doit, et on travaille en étroite collaboration avec la SACEM et la SUISA pour changer le système. Nous, on veut que les musiciens soient la priorité de ces boites. Et pas seulement les musiciens du top 50, ni les dix plus grands musiciens, eux ils touchent de l’argent. Nous, on veut que tous les musiciens, y compris les petits mecs qui font genre 300 concerts par an, on veut que eux ils touchent l’argent. C’est pour ça qu’on se bat en ce moment. 

Et cette demande, comment est-elle reçue au niveau de la SACEM, en Suisse ?
Justement, la SUISA travaille avec nous là-dessus, ils veulent aussi que les choses changent, ils voient qu’il y a un problème. Ils sont là « ouais ok, on voit qu’il y a beaucoup de musiciens et qu’ils ne touchent pas l’argent, mais de l’argent il y en a… alors comment pourrait-on changer ce système ? » Moi je pense que tout ce système devrait être repensé. Il y a tellement de musiciens, et il y a aussi tellement d’argent autour de ces musiciens… On est toujours en train de verser de l’argent à la SACEM, mais qui touche vraiment cet argent ? Où est-ce qu’il disparaît cet argent ? Je veux que Bloodshot Bill, Delaney Davidson, je veux que tout le monde le touche aussi cet argent ! Ce n'est vraiment pas juste que DJ Bobo et Manu Chao touchent cet argent alors ! Sans pour autant dire que Manu Chao, c’est pareil que DJ Bobo (rires) j’aime beaucoup Manu Chao (rires).

A propos des Monsters maintenant, qu’est ce qui a fait que vous vous soyez remis ensembles ?
Ah, mais on ne s’est jamais séparés ! (rires) On a commencé en 1986 et on a continué. Au début on faisait beaucoup de concerts et de tournées, et puis paf, j’ai eu un enfant, paf, j’en ai eu un deuxième, puis le bassiste a eu un enfant, le batteur a eu un enfant… ça fait beaucoup d’enfants ! Ce n’est pas facile à gérer, surtout qu’il ne faut pas mettre nos femmes en colère… (rires) alors on doit s’arranger, trouver des priorités. Les Monsters ont toujours été une priorité, on a toujours gardé un jour de répét(ition) par semaine pour se retrouver, puisqu’on vient tous d’une ville différente mais que le groupe est basé à Zürich. Ça, avec les tournées, il y a toujours eu beaucoup à organiser. Mais sinon je m’éclate vraiment avec les Monsters, c’est vraiment le groupe avec lequel je préfère jouer.

Les Monsters sont vraiment une référence en Europe ... Ca te surprend d’entendre ça ?
Oui oui, je suis très surpris ! (rires) C’est vraiment que du punk trash qu’on joue, c’est pas comme si c’était de la musique du Top 50. Je suis toujours surpris que notre musique plaise. 

Est-ce que tu peux expliquer ça ?
Non, c’est un vrai mystère ! (rires) Je n’en ai pas la moindre idée (rires). On ne sait pas jouer, on ne sait pas chanter, on ne sait rien faire. Mais bon, ça plait, alors tant mieux !


Mais vous, vous jouez avec vos tripes !

Oui, mais même si tu joues avec tes tripes, tu peux être très mauvais…
Est-ce que tu peux nous parler de Die Zorros ?
Ah ! Oui, c’est un de mes groupes préférés. Et personne n’aime ce groupe. C’est le groupe qui ce vent le moins bien sur le label. Je joue de la batterie dans ce groupe, et c’est vraiment trop cool, c’est n’importe quoi, les concerts sont complètement bordéliques. On ne répète jamais, et même en studio on n’a pas de chanson, on ne répète pas, on ne fait rien du tout ! Avant de commencer une chanson, n’importe qui peut en choisir une, et puis ensuite on se met à jouer quelque chose quoi. Qu’est-ce qu’on se marre, c’est vraiment un super-groupe.

Tu as d’autres choses en cours ? D’autres groupes ?
Non, non, je pense que c’est tout. Par le passé j’ai toujours eu plein de groupes différents. Mais maintenant, j’ai trois groupes et c’est : Die Zorros, les Monsters et Reverend Beatman.

Alors maintenant quelques questions sur l’enregistrement des vinyles. Tu sais qu’on a aussi un label, et on trouve que le tien est vraiment un bel exemple. Quel genre de machines, matériel vous utilisez pour enregistrer ?
Ça dépend. On peut faire du numérique comme de l’analogique. D’une manière générale, j’essaie de travailler avec de bons studios, que je connaisse déjà, et il y en a beaucoup. Il y en a quelques-uns en Italie, il y a Star Track en Suisse, les Toe Rag Studios à Londres. J’aime bien travailler avec de bons ingénieurs son, des gens dont je sois sûr qu’ils s’y connaissent. Ça c’est la première étape de l’enregistrement, et puis ensuite il y a la masterisation : une fois qu’on a la version finale de l’enregistrement on la donne au gars qui s’occupe de la masterisation, c’est un procédé complètement différent et ça coûte assez cher. Je travaille aussi parfois avec plusieurs masteriseurs différents. Ensuite il y a l’encodage, qui est aussi très important. En général, après la masterisation, on peut presser le CD, mais si on veut faire un disque vinyle, alors il faut un bon encodage. À Berne, on a de bons encodeurs, les Centraldubs et aussi en République Tchèque, en ce moment il y a un encodeur qui est vraiment très doué, j’adore son travail, il fait vraiment quelque chose de bien sûr le vinyle, le son est très fort, la qualité est super bonne, et même la qualité vinyle est super bien. J’adore cette plateforme de pressage.

Alors, vous ne vous occupez pas de la masterisation ?
Non non. Je travaille avec des gens très talentueux. Il y a plusieurs personnes en Suisse à qui je fais appel pour les disques plus puissants, et puis Eric Merz pour ce qui est blues, lui, il travaille vraiment bien le son. Il n’y a pas tant de vrais bons masteriseurs, peut-être une dizaine sur terre, et il faut les trouver, et ça c’est dur.

Donc l’enregistrement et la masterisation, ce sont des étapes très importantes pour toi…
Absolument. Ça peut être un groupe très trash, peu importe, mais je veux vraiment obtenir un disque qui déchire tout. Tu vois, quand tu le mets sur la platine et que là il se passe quelque chose, tu es assis dans une pièce et tu es tout à coup transporté complètement ailleurs, c’est ça que je veux faire. Mais c’est aussi beaucoup de travail. Souvent on se prend beaucoup la tête avec les musiciens sur l’enregistrement. Avec Delaney, par exemple, cela peut durer des mois. Des mois de discussions… sur ce que je n’aime pas, ce que lui n’aime pas… c’est tout un processus. Le réenregistrement par exemple, que ce soit dans un studio ou à la maison, une chose en amenant une autre, cela me prend en général entre un et deux ans de travail avec un groupe, pour un disque. C’est vraiment beaucoup de travail (rires). Et je peux vraiment être très chiant avec les musiciens, je tiens d’ailleurs à m’en excuser auprès d’eux. Je suis désolé d’être aussi chiant. Mais je pense qu’au final on obtient toujours quelque chose qui nous plaît vraiment.
Et pour les couvertures d’albums, c’est la même chose ?
Oui, la même chose. Encore une fois je m’excuse auprès de tous mes musiciens. Si ce n’est pas absolument parfait, je peux vraiment devenir très chiant (rires).

Est-ce que tu travailles avec des designers ou bien tu fais tout toi-même ?
J’en fais la plupart moi-même. Mais après, ça dépend si ça plaît aux groupes ou non. Sinon, il faut qu’ils fassent une autre couverture, ou alors ils trouvent un artiste avec qui je dois travailler et souvent, soit je le vire soit je le pousse vraiment dans ses retranchements. Je peux vraiment, vraiment être tellement chiant ! Ce n’est pas de la méchanceté ou quoi que ce soit, c’est seulement que je veux créer le meilleur produit sur la planète. Bon, ce n’est que mon humble opinion, peut-être que ce n’est pas la meilleure production sur la planète. Mais j’essaie toujours de faire au mieux que je peux. J’essaie de progresser…

Écoutez l'émission avec sa playlist sur Casbah-records.com

English version

Who was Lightning Beatman?
Lightning Beatman was my alter ego. I’m Beatman Zeller from Bern, Switzerland. In the 80s and 90s I was in Los Angeles and I discovered Mexican wrestling, so I bought myself a wrestling mask and went on the stage as a one man band, fought against myself and always won. (laughs) But the mask took his personality after me and it got a bit crazy, I lost my voice, and after ten years of Lightning Beatman my whole body was destroyed so I had to change the name to Reverend Beatman.

So… How and why did Lightning Beatman become Reverend Beatman?
Well that’s why. This character, Lightning Beatman was just too evil, too sick and I had to get rid of it. (laughs)

Does Reverend Beatman have a special mission on earth? With music?
Yeah, it’s love. (laughs) I love love. It’s the best.

So, Lightning Beatman, Reverend Beatman and Beatman Zeller, are they different characters?
They are all me. Everybody has a lot of different characters in themselves. Onstage, I find out which one is the character I want to show, so all those characters are in me, I let them out on the stage, but it’s all me.

So you don’t want to use your wrestler mask…
I don’t need to hide behind a mask anymore. It’s really easy to put the mask on, you can explore yourself in different ways, but at the same time never explore yourself. It’s an amazing experience to hide behind the mask and go freak out, get naked... I would never do that without the mask. Now, I don’t need the mask anymore.

Now, about the label Voodoo Rhythm Records, when has the adventure started?
It started also in the mid-80s, when I was working with a record label and record shop called Record Junkie. I already had a little pirate tape. I learned about running a label in the mid-80s with the Record Junkie Records, then in 1992 I made it more professional with the Voodoo Rhythm Record Label. 

What is your stance about supporting small bands that will never be profitable?
That’s exactly that. When I was on tour in the 80s, 90s I saw so many bands that couldn’t find a record label. And I wanted to have a record from that band in my record collection, because I’m a record collector so… The only way to have a record from that band in my record collection is to make a record of that band. So actually I started to make the label because I wanted to have records of those bands I love so much. And that’s what I still do! I get demo tapes and I see bands, other people say “oh my god this is too crazy” and I normally do it. (laughs)

That’s actually in my next question:  does Voodoo have some sort of guideline, like one man bands, European, trash blues… or is it mostly based on encounters?
My guideline, I think, is no guideline. The honesty of the bands, I think that’s the line, they’re all good people and they all write great songs but then the music style, I don’t care, if there are 10 people in the band, or only one person in the band, or if they make jazz or rock or punk or blues, I don’t care, if it’s good then it appeals to me and I want to make it. It’s kind of like being in a flea market, searching for something, at first you don’t know what you’re searching for and you find it and you just have to have it. It’s the same.

I suppose you have many people coming to you and asking you if you want to release their album?
Yeah, many people come.

And does it work?
Yeah, sometimes it works, but it’s really hard because I don’t want to disappoint anyone. If someone starts playing the guitar and recording their own music, that’s already an amazing step! It’s really hard for me to tell them that I won’t release it on Voodoo Rhythm Records, even if I think their music is great! For me that’s the hardest part in running a label. And I don’t know exactly what kind of records I put out, it’s a feeling I have inside, you know, it’s not my brain telling me to make a record of this musician, it’s something else, I just have to do it. If this feeling comes out, I do it, it’s not something personal against or in favour of the musician, it’s just that I have to do it, it’s my passion.

Does Voodoo want to get bigger?
Oh yeah, we do, totally! Bigger is better you know (laughs)! We like where we are at the moment, but I think that there are so many people in the world, you know, that’s trillions of people. And what the mainstream music is bringing them, it’s just not creative, it brings people nowhere. I want the music to be creative, to be different. When you put on the radio it’s always the same ten musicians 24hours a day! There’s so much different music in the world, from Africa to Arabia, to America, Switzerland, France etc. Everybody does different music and they are so good, they write such good songs! Why don’t they get played on the radio? This would open the mind of every person in the world! This would change the whole world for ever, if this music was heard by a lot of people, and if these people were interested in that music. Our brain is so big, we can take so much, and they only give us so little, it’s not fair. (laughs)

What are Voodoo Rhythm Records’ future releases?
At the moment, it’s the new release of Hank Haint, an English one man band, it’s brilliant. No, it’s like, super brilliant. Then in September we have Becky Lee & Drunkfoot she’s a girl from Arizona, it’s a one woman / girl band and she’s just like amazing. When you hear all the blues guys, it’s very man dominated. Then comes this woman from Arizona (Tempee Arizona) and she’s just a whole orchestra. Blues, kind of desert blues band. It’s amazing also the songs she sings, what she writes about, they’re all crazy stories from her life. She has a crazy life story, it’s all in her music, it’s really beautiful. In October we’re going to have the Heart Attack Alley, it’s a band from New Zealand, it’s two girls and one guy, it’s also kind of a bluesy band and it’s also really good.

A few years ago, you had problems with the SACEM, Voodoo Rhythm was about to close down, can you tell us about this episode and the solidarity it provoked around you?
I’m a small record label, like a lot of other small record labels and you have this royalty policy: SACEM, SUISA etc. A lot of copyright companies which is actually a good thing, they stand behind the musicians, they care about them. But I paid so much money to those companies and the bands never got the money and I was getting kind of pissed off, so I stopped paying them and I gave the money directly to the bands, without going through the copyright companies, and instead of money I gave records, I gave them a lot of records that I played. So, that was good for me and it was good for the bands and of course the copyright companies didn’t like that at all. So they sued me for like 50 or 60 thousand bucks, and I couldn’t pay it. So I wrote on the internet “please help, I have to close down Voodoo Rhythm Records”. People from all over the world sent me money and made benefit concerts, and in the end I could pay! It’s amazing. If you create a label, you’re sitting behind your computer and you can’t imagine how much contact you can get with the people who are buying the records. And if you do something like that you get so many reactions, it’s just amazing. We realized that we were doing something that maybe the people really liked. They like that we are doing something different, that it’s not just one style but many styles and the music is different, it’s strange… It was really helpful. But now, we pay the money, we’re working really close with SACEM and SUISA together to change the whole system. We want the musicians to be the priority of those companies. Not only the top 100 or the top ten musicians, they get the money, we want that all musicians, the little guys who play like 300 shows a year, that they get the money, that’s what we are fighting for at the moment.

How is your claim received by the SACEM in Switzerland?
Well, SUISA is working really close with us, they also want to change, they see the problem. They’re like “ok, we see that there are so many musicians and that they don’t get the money, there is so much money and we don’t know where it’s going… how we could change the system.” I think the whole system has to be rethought. So many musicians and so much money around… You’re always paying the SACEM, but who gets that money, where does the money go? I want that bloodshot bill gets the money as well you know, everybody, Delaney Davidson! It’s just not fair that DJ Bobo and Manu Chao get the money. I’m not saying that Manu Chao is the same as DJ Bobo (laughs). I love Manu Chao (laughs).

Now about The Monsters? Why did The Monsters get back together?
We never split up! (Jordane laughs and apologizes). We started in 1986, and we just kept on going. In the beginning we were doing a lot of shows and tours, and then, POP, I got a kid, POP, I got a second kid, then the bass player got a kid, the drummer got a kid… It’s a lot of kids! It’s really hard to deal with that, you know you don’t want to get the women upset, so… (laughs) So we have to arrange things and see priorities. The Monsters always were a priority, we have always had a rehearsal day a week so we could get together, everyone in the band is from a different town but our band is based in Zürich. That, and the tours, there has always been a lot of organising to do. I’m having a lot of fun with the Monsters, it’s my favourite band to play with.

The Monsters are a reference, here in Europe. Are you surprised to hear that?
Yes, I’m really surprised! (laughs) It’s just trash punk we’re doing it’s not like top 100 music. I’m always surprised that the people like us.

Can you explain it?
No, it’s a mystery (laughs). I have no idea why (laughs). We can’t play, we can’t sing, we can’t do anything. They like it, that’s good!

But, you play music with your heart!
You can be terrible even if you’re playing with your heart.

Can you tell us about Die Zorros?
Oh, that’s one of my favourite bands. And nobody likes that band. It’s the worst selling band on the label. I play drums on that band, it’s so much fun, it’s so chaotic, the live shows... We never rehearse, and even for the studio we don’t even have songs, we don’t rehearse, we don’t do anything. Before a song, anybody can choose one, and then we just play something. It’s a lot of fun, a lot of fun, really good band.

Do you have other things to come? Other bands...?
No, I think that’s it. In the past I always had a lot of bands, but now my three bands are Die Zorros, The Monsters and Reverend Beatman. 

Just a few questions about how you record your vinyls: you know we also have a label, and we think you’re quite at the top. What kind of material do you use to record?
It varies. We can record digital, analogue... I try to work with good studios that I already know, there are many good studios. There are some in Italy, there is Star Track in Switzerland, Toe Rag Studios in London. I like to work with good engineers, people I know who know about the sound. That’s the first step of recording, and the second step is the mastering process: you have the final recording and you give it to the mastering guy, that’s something completely different and they are quite expensive. I also work with a couple of different mastering guys together. And after that is the coding process, which is also a very important process. After the mastering you can press the CD, but if you want to make a vinyl record you need a good code. So we have in Bern a pretty good codage the Centraldubs, or in Czech Republic there is at the moment a really good coder, I love this codage, he makes a really good code on the vinyl it’s very loud and the quality is very good, and the vinyl quality is very good, I like this pressing plate a lot.

So you don’t do the mastering yourself?
No. I really have a lot of great people I work with. There are a few in Switzerland for the more powerful records and then I have Eric Merz for the more bluesy stuff, he’s just opening up the whole sounds. There are not a lot of good mastering guys, maybe ten in the whole world, and you have to find those guys and it’s really hard to find them.

So, the recording and mastering stages are important for you...
Yeah. It can be a super trash band, I don’t care, but I want to have a record that blows my head off. You know, when you put it on and then you have something, you’re sitting in a room and it just takes you away to another place, that’s what I want to do. But that’s also a lot of work. Sometimes I argue a lot with my musicians about the recording. With Delaney for example, it can sometimes be months of arguing about what I don’t like, what he doesn’t like, it’s a whole process you know. Re-recording and stuff, you go to the artist’s studio, make home recording, you do that and you do this, a record normally takes me from 1 to 2 years worth of work with a band, for one record. It’s a lot of work. (laughs) I can be a real pain in the ass for the musicians, I apologise to my musicians for being a pain in the ass. But I think in the end we have a product we really like. 

What about the album covers and artwork, is it the same thing?
Yes, it’s the same, I apologise to all my bands again. If it’s not super perfect I can be a real pain in the ass. (laughs)

Do you have designers you work with or do you do it all yourself?
I do it mostly myself. But you know it depends if the bands like it or not, otherwise they have to make another one, or they can bring a graphic artist and I have to work with the graphic artist, or fire him or push him so that he goes to the limit of what he can do. I can really, really, be a pain in the ass. It’s not that I am mean or anything, it’s just that I want to have the best product ever made on this planet. But that is only my opinion you know, maybe it isn’t the best product ever made on this planet. But I always try to go a little bit higher. I try...