lundi 10 décembre 2012

REVIEW II / DECEMBRE 2012


Les périodes de fêtes et les anniversaires sont toujours l’occasion pour injecter un peu de botox dans les chairs putréfiées de vieilles gloires d’antan, histoire de faire gonfler le chiffre d’affaires de majors déjà bouffies et obèses. On réédite donc le coffret officiel de luxe du Velvet Underground pour fêter leurs 40e anniversaires avec la banane de Warhol pour étendard. L’histoire d’une oeuvre d’art devenue un simple logo, sorte d’accomplissement pour le publicitaire artiste.
Je ne reviendrais pas sur le Velvet Underground mais plutôt sur un groupe «the Subsonics» qui fait revivre l’esprit des New-Yorkais dans un anonymat angoissant et l’initiative du label de John Dwyer (Thee Oh sees) Castle Face Records.

The Subsonics (Slovenly Records) - In the Black Spot

Les Subsonics sont un trio mixte d'Atlanta et viennent de commettre leur 7ème LP sur le label Slovenly Records. Ne jamais avoir entendu parler de cet excellent groupe alors que j’anime depuis 10 ans rock à la casbah me navre un peu. Pourquoi la qualité trouve aussi peu d’écho dans notre vaste monde. Après moult recherches le constat se poursuit, The Subsonics n’a pas de site à jour depuis 2008, à peine une ou deux chroniques dont une en Hollandais. Autant dire qu’aujourd’hui je vous ouvre la porte d’un grand groupe que la masse ignore.
The Subsonics sont plus qu’une pâle copie de la clique à Lou Reed, il convoque les esprits de Bo Diddley, The Cramps et du Velvet Underground sur l’album «In the Black Spot», sorte de condensé fragile et sans prétention de rock’n’roll garage sous tension new-yorkaise. La voix de Clay Reed (comme c’est bizarre) est certes moins magnétiques mais elle garde cette tonalité nasale et abimée, les ambiances sont noirs et oniriques portée par la guitare riche en réverbération et les cymbales omniprésentes de Buffi Agüero. Plutôt que de perdre votre pognon pour un coffret sans grande nouveauté, ruez-vous sur cette petite merveille sortie sur un petit label indépendant et honnête comme Slovenly record.



Velvet Underground (Castle Face Records) - Velvet Underground and Nico by Castle Face and friends

Autant vous dire que cette initiative n’a absolument pas besoin de nous pour se vendre. Avant même sa sortie officielle tous les vinyles étaient vendus et les demandes de repressage en cours. Voilà, une autre manière de fêter le quarantième anniversaire des new-yorkais tout en découvrant la nouvelle scène rock garage de la côte-est américaine. En gros, c’est un peu ce que devrait faire nos chère magazine plutôt que de consacrer un ènieme dossier au groupe. Avec cette compilation vous découvrirez donc The Mallard, les excellent Warm Soda né sur les cendres encore fumantes des Bare Wires sous la houlette de Matthew Melton, la pop chatoyante des White Fence ainsi que l’énergie juvéniles des Blasted Canyon.
Cet objet est également l’occasion de retrouver les têtes de pont de la scène californienne en la personne de Ty Segall et Thee Oh Sees. Ne d'espérer pas si vous n’arrivez pas à mettre la main sur ce disque car vous pourrez vous consoler avec les titres mp3 qui circulent en libre téléchargement sur la toile. On peut quasiment reconstituer l’album avec un peu de flaire et de patience.
 

vendredi 7 décembre 2012

REVIEW I / DECEMBRE 2012

METZ - METZ (Subpop Records)

Subpop veut vous faire passer un sale hiver, vous donner la rage et l'envie de taper tout ce qui est fragile et encore innocent. Oui car avec la sortie d'un album comme celui des canadiens de Metz il va falloir avoir les nerfs solides. Surplus de guitares sur une toile de fond grise et froide, les compos de Metz font rarement dans l'attendrissement. On pense à The Bronx avec un peu plus de matière grise. En effet si le registre est souvent agressif et les tonalités cinglantes, la production de l'album, elle, respire d'une certaine profondeur. Comme un bon bouquin, l'album possède une réel ligne directrice qui vous feront plonger dans les abysses. A la colère s'ajoute une hypnose convaincante, ce qui montre comment le groupe arrive à sortir de ses registres post-punk / hardcore pour céléber quelque chose d'unique. On languit de voir le groupe se défendre en live, mais selon le maitre youtube, le trio transforme l'épreuve de la scène en quelque chose de plus rock'n'roll.   En gros un album ultra bien fait, qui à l'inverse de la cheminée, ne vous réchauffera pas le coeur.


BARE WIRES - Idles Dreams (Southpaw Records)

Comment entamer ce papier sans parler de la fin tragique des Bare Wires lors du dernier festival d'Austin le SXSW. Soyons honnête, je n'avais jamais écouté Bare Wires malgré quelques chroniques positives de leurs précédents albums. Un peu saturé par l'invasion pop garage Lofi de la côte Est, je ne m'étais jamais penché sur le trio d'Oakland. Idles Dreams est un album posthume et sa qualité finira de casser le moral des fans. Je débute donc mon apprentissage de la Bare Wires attitude par la fin. Je ne suis pas allé jusqu'à enfiler des chemises à fleurs, à me laisser pousser les cheveux tout en peignant avec soin une moustache drue. Je me suis contenté de leur musique. La première écoute ne m'a pas emballé, une voix faiblarde, des guitares sans riffs avec des passages aux mélodies pleines de guimauve. J'aurais dû passer à coté de ce disque mais je ne sais pas pourquoi, je l'ai remis dans ma platine une seconde fois. Les mélodies d'Idles Dreams" où l'excellent "psychic winds" ont commencé à s'impregner et l'envie de les fredonner se sont imposées. Les Bare Wires se démarquaient de la scène californienne, œuvrant dans une veine glam-punk légère plutôt que le garage psychédélique des Oh Sees et Ty Segall. Sur ce disque rien n'est agressif, la voix est feutrée, douce quasi nostalgique et les guitares soutiennent avec discrétion les envolées pops du trio. Addictif et génial, laissez à cet album le temps d'infuser et ensuite savourer. Ci dessous vous trouverez le clip de "School Day" qui en première écoute peut paraitre mièvre mais qui finit par être un titre d'une nostalgie folle que l'on aime à entendre.



samedi 1 décembre 2012

INTERVIEW - Reverend Beatman (fondateur de Voodoo Ryhthm Records)

English version at the bottom page





Qui était Lightning Beatman?

Lightning Beatman, c’était un alter ego. Je suis Beatman Zeller, de Bern en Suisse. Dans les années 80 90, j’ai découvert le catch mexicain (lucha libre) et me suis acheté un masque de combat. Une fois sur scène j’étais ce one man band, je me battais contre moi-même, et je gagnais à chaque fois! (rires) ce masque se nourrissait de ma personnalité, devenait de plus en plus taré, et après dix ans de Lightning Beatman mon corps était complètement ravagé, et là j’ai dû changer de nom pour  Reverend Beatman.



Comment et pourquoi est-ce que Lightning Beatman est devenu le Reverend Beatman ?
Ben oui c’est pour ça. Ce personnage de Lightning Beatman était bien trop noir, trop malsain, et j’ai du m’en débarrasser. (rires)

Est-ce que le Reverend Beatman a une mission particulière sur Terre ? Avec la musique je veux dire ?
Oui bien sûr, c’est l’amour ! (rires) J’aime l’amour. Y a rien de mieux.

Alors, Lightning Beatman, Reverend Beatman et Beatman Zeller, ce sont des personnages différents?
Eh bien, c’est toujours moi ! Chacun a plusieurs personnages en soi. Sur scène, je décide lequel je veux interpréter. Mais tous ces personnages font partie de moi, je les lâche sur la scène, mais tout ça, c’est moi.

Et tu ne veux plus utiliser ton masque de combat...
Je ne ressens plus le besoin de me cacher derrière un masque. C’est très facile de porter un masque, on peut explorer plein d’aspects de soi-même sans jamais se découvrir vraiment. C’est extraordinaire comme expérience de se cacher derrière un masque, de péter un câble, devenir dingue et se mettre à nu… Je n’aurais jamais pu faire ça sans le masque ! Mais maintenant je n’en ai plus besoin…




A propos du label, Voodoo Rhythm Records, quand est-ce que ça a commencé ?

Ça a aussi commencé dans les années 80, je travaillais à l’époque pour un label et magasin de disques qui s’appelait Record Junkie. J’avais déjà une petite cassette pirate. Donc dans les années 80, avec Record Junkie Records, j’apprenais un peu comment fonctionnait un label, et puis en 1992 j’ai sauté le pas et j’ai créé le label Voodoo Rhythm Records.

Dans quelle mesure est-ce que tu arrives à soutenir des groupes peu connus, et qui ne te rapporteront probablement jamais d’argent ?
En fait c’est vraiment de ça dont’il s’agit. Quand j’étais en tournée dans les années 80 90, il y avait tellement de groupes qui ne trouvaient pas de label ! Et moi, je voulais un de leurs disques pour ma collection, parce que je suis collectionneur de vinyles ! Alors la seule façon d’avoir un disque à eux dans ma collection de vinyle c’était de leur sortir un disque ! J’ai vraiment créé ce label parce que je voulais avoir des vinyles de ces groupes que j’adore. Et c’est toujours ce que je fais ! Je reçois des démos, je vois des groupes, les autres disent « oh là c’est complètement dingue ! » et en général je fonce (rires).

Justement, est-ce que Voodoo suit un genre de fil conducteur, comment est-ce que vous choisissez vos groupes, est-ce que c’est une question de style, ou plutôt de rencontres… ?
Ah, mon fil conducteur, je pense, c’est justement qu’il n’y en a pas. L’authenticité des musiciens, c’est ça qui compte. Ce sont tous des gens géniaux, qui écrivent de super chansons, mais après, le style musical, je m’en fous, s’il y a une ou dix personnes dans le groupe, je m’en fous, qu’ils fassent du jazz, du rock, du punk, du blues, ça m’est égal. Si c’est de la bonne musique, alors ça m’attire, et j’ai envie de les avoir sur mon label. C’est un peu comme d’être dans un marché aux puces et de chercher quelque chose sans trop savoir quoi, et qu’une fois qu’on l’a trouvé, on le veut absolument. C’est un peu pareil.

J’imagine que beaucoup de gens viennent te voir pour te demander de sortir un album ? 
Oui, oui beaucoup de gens viennent me voir.

Et est-ce que ça marche ?
Oui, parfois ça marche, mais c’est vraiment difficile pour moi car je ne veux décevoir personne. Si quelqu’un commence à jouer de la guitare et à enregistrer sa propre musique, c’est déjà super ! Et c’est très dur pour moi de lui dire que je ne vais pas sortir sa musique sur Voodoo Rhythm Records, même si je la trouve géniale ! Selon moi c’est ce qu’il y a de plus difficile dans la gestion d’un label. Il n’y a pas un style de musique Voodoo Rhythm Records en particulier, c’est juste une histoire d’émotion, de sentiment. Ce n’est pas mon cerveau qui me guide vers un artiste ou un autre, c’est autre chose, qui ne me laisse pas le choix, il n’y a rien de personnel, pour ou contre tel ou tel musicien. Si je ressens cette émotion, alors il faut que je le fasse, c’est tout. C’est ma passion. 

Est-ce que Voodoo Rhythm veut s’agrandir ?
Ah, oui bien sûr qu’on veut ! Plus c’est gros mieux c’est hein ! (rires) On aime bien ce qu’on fait en ce moment, mais je pense qu’il y a tellement de monde sur cette planète, des milliards de personnes. Et dans ce que la musique grand public leur apporte, il n’y a aucune créativité, et ça n’amène les gens nulle part. Moi, je veux que la musique soit créative, différente. Quand on allume la radio, ils passent toujours les dix mêmes musiciens, 24 heures sur 24 ! Alors qu’il y a tellement de diversité musicale dans le monde, entre l’Afrique, l’Arabie, l’Amérique, la Suisse, la France, etc. Chacun fait quelque chose de différent, et ils sont tous talentueux, leurs chansons sont vraiment bonnes ! Pourquoi est-ce qu’ils ne passent pas à la radio ? Ça, ça ouvrirait un peu l’esprit de tout le monde sur Terre. Ça, ça changerait le monde pour toujours, si beaucoup de gens écoutaient cette musique, et si ces mêmes personnes s’intéressaient à cette musique. Dans nos cerveaux, il y a de la place pour tellement de diversité, de complexité, et pourtant on nous donne si peu ! Ce n'est pas juste (rires).


Quelles sont vos prochaines sorties sur Voodoo Rhythm Records ?Alors en ce moment, on prépare la sortie d'Hank Haint, c’est un one man band d’Angleterre, c’est génial. Non, en fait c’est vraiment super-génial. Et puis en septembre on va sortir Becky Lee & Drunkfoot, c’est une fille qui vient de l’Arizona, c’est un one woman / girl band et elle est époustouflante. Le milieu du blues est vachement dominé par les hommes, et puis il y a cette femme qui débarque de Tempee en Arizona, et c’est un vrai orchestre à elle toute seule. C’est du blues, un peu du desert blues. Les chansons qu’elle écrit et qu’elle chante aussi sont impressionnantes, ce sont toutes des histoires complètement déjantées de sa vie à elle. L’histoire de sa vie est dingue, et tout est dans sa musique, c’est vraiment très beau. Et puis en octobre, on va sortir les Heart Attack Alley, c’est un groupe néo-zélandais, deux filles et un gars, c’est aussi plutôt blues, et c’est aussi très très bon.


Il y a quelques années, vous avez eu des problèmes avec la SACEM, et Voodoo Rhythm a été menacé de fermer, est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur ce qui s’est passé et sur les manifestations de solidarité qui ont en ont résulté ?

Je tiens un petit label, comme plein d’autres, et il y a les droits d’auteurs : la SACEM, SUISA… Il y a des tonnes de sociétés de gestion des droits d’auteurs, et ça c’est une bonne chose, car elles soutiennent les musiciens et se soucient de leur situation. Mais je leur versais tellement d’argent, alors que les groupes ne touchaient rien, que j’en ai eu marre, et j’ai arrêté de les payer et je donnais l’argent directement aux groupes. A la place d’argent, je leur donnais des disques, plein de vinyles de groupes que je sortais. C’était parfait pour moi et pour les groupes, mais bien sûr les sociétés de gestions des droits d’auteur, ça ne leur a pas plu du tout. Alors j’ai été poursuivi en justice pour 50, 60 millions de dollars, et je ne pouvais pas payer ! Alors j’ai lancé un appel sur internet « à l’aide, Voodoo Rhythm Records est menacé de fermer ». Et des gens, de partout sur la planète, m’ont envoyé de l’argent, ont organisé des concerts dont les bénéfices étaient reversés à Voodoo Rhythm, et au final j’ai pu payer ! C’était dingue. Quand on tient un label, et qu’on est chez soi, devant son écran d’ordinateur, on ne se rend pas compte du nombre de contacts que l’on crée avec les gens qui achètent nos disques. Et en faisant ça, on obtient tellement de réactions, c’est dingue. Nous, on s’est rendu compte qu’on créait quelque chose que peut être les gens aimaient vraiment. Et ce qui leur plait c’est qu’on fasse quelque chose de différent, et qu’on ne se limite pas à un style mais qu’on s’intéresse à tous les styles musicaux, et la musique qu’on sort est différente, elle est bizarre… Ca nous a vraiment bien aidés. Mais bon, maintenant, on paie l’argent qu’on doit, et on travaille en étroite collaboration avec la SACEM et la SUISA pour changer le système. Nous, on veut que les musiciens soient la priorité de ces boites. Et pas seulement les musiciens du top 50, ni les dix plus grands musiciens, eux ils touchent de l’argent. Nous, on veut que tous les musiciens, y compris les petits mecs qui font genre 300 concerts par an, on veut que eux ils touchent l’argent. C’est pour ça qu’on se bat en ce moment. 

Et cette demande, comment est-elle reçue au niveau de la SACEM, en Suisse ?
Justement, la SUISA travaille avec nous là-dessus, ils veulent aussi que les choses changent, ils voient qu’il y a un problème. Ils sont là « ouais ok, on voit qu’il y a beaucoup de musiciens et qu’ils ne touchent pas l’argent, mais de l’argent il y en a… alors comment pourrait-on changer ce système ? » Moi je pense que tout ce système devrait être repensé. Il y a tellement de musiciens, et il y a aussi tellement d’argent autour de ces musiciens… On est toujours en train de verser de l’argent à la SACEM, mais qui touche vraiment cet argent ? Où est-ce qu’il disparaît cet argent ? Je veux que Bloodshot Bill, Delaney Davidson, je veux que tout le monde le touche aussi cet argent ! Ce n'est vraiment pas juste que DJ Bobo et Manu Chao touchent cet argent alors ! Sans pour autant dire que Manu Chao, c’est pareil que DJ Bobo (rires) j’aime beaucoup Manu Chao (rires).

A propos des Monsters maintenant, qu’est ce qui a fait que vous vous soyez remis ensembles ?
Ah, mais on ne s’est jamais séparés ! (rires) On a commencé en 1986 et on a continué. Au début on faisait beaucoup de concerts et de tournées, et puis paf, j’ai eu un enfant, paf, j’en ai eu un deuxième, puis le bassiste a eu un enfant, le batteur a eu un enfant… ça fait beaucoup d’enfants ! Ce n’est pas facile à gérer, surtout qu’il ne faut pas mettre nos femmes en colère… (rires) alors on doit s’arranger, trouver des priorités. Les Monsters ont toujours été une priorité, on a toujours gardé un jour de répét(ition) par semaine pour se retrouver, puisqu’on vient tous d’une ville différente mais que le groupe est basé à Zürich. Ça, avec les tournées, il y a toujours eu beaucoup à organiser. Mais sinon je m’éclate vraiment avec les Monsters, c’est vraiment le groupe avec lequel je préfère jouer.

Les Monsters sont vraiment une référence en Europe ... Ca te surprend d’entendre ça ?
Oui oui, je suis très surpris ! (rires) C’est vraiment que du punk trash qu’on joue, c’est pas comme si c’était de la musique du Top 50. Je suis toujours surpris que notre musique plaise. 

Est-ce que tu peux expliquer ça ?
Non, c’est un vrai mystère ! (rires) Je n’en ai pas la moindre idée (rires). On ne sait pas jouer, on ne sait pas chanter, on ne sait rien faire. Mais bon, ça plait, alors tant mieux !


Mais vous, vous jouez avec vos tripes !

Oui, mais même si tu joues avec tes tripes, tu peux être très mauvais…
Est-ce que tu peux nous parler de Die Zorros ?
Ah ! Oui, c’est un de mes groupes préférés. Et personne n’aime ce groupe. C’est le groupe qui ce vent le moins bien sur le label. Je joue de la batterie dans ce groupe, et c’est vraiment trop cool, c’est n’importe quoi, les concerts sont complètement bordéliques. On ne répète jamais, et même en studio on n’a pas de chanson, on ne répète pas, on ne fait rien du tout ! Avant de commencer une chanson, n’importe qui peut en choisir une, et puis ensuite on se met à jouer quelque chose quoi. Qu’est-ce qu’on se marre, c’est vraiment un super-groupe.

Tu as d’autres choses en cours ? D’autres groupes ?
Non, non, je pense que c’est tout. Par le passé j’ai toujours eu plein de groupes différents. Mais maintenant, j’ai trois groupes et c’est : Die Zorros, les Monsters et Reverend Beatman.

Alors maintenant quelques questions sur l’enregistrement des vinyles. Tu sais qu’on a aussi un label, et on trouve que le tien est vraiment un bel exemple. Quel genre de machines, matériel vous utilisez pour enregistrer ?
Ça dépend. On peut faire du numérique comme de l’analogique. D’une manière générale, j’essaie de travailler avec de bons studios, que je connaisse déjà, et il y en a beaucoup. Il y en a quelques-uns en Italie, il y a Star Track en Suisse, les Toe Rag Studios à Londres. J’aime bien travailler avec de bons ingénieurs son, des gens dont je sois sûr qu’ils s’y connaissent. Ça c’est la première étape de l’enregistrement, et puis ensuite il y a la masterisation : une fois qu’on a la version finale de l’enregistrement on la donne au gars qui s’occupe de la masterisation, c’est un procédé complètement différent et ça coûte assez cher. Je travaille aussi parfois avec plusieurs masteriseurs différents. Ensuite il y a l’encodage, qui est aussi très important. En général, après la masterisation, on peut presser le CD, mais si on veut faire un disque vinyle, alors il faut un bon encodage. À Berne, on a de bons encodeurs, les Centraldubs et aussi en République Tchèque, en ce moment il y a un encodeur qui est vraiment très doué, j’adore son travail, il fait vraiment quelque chose de bien sûr le vinyle, le son est très fort, la qualité est super bonne, et même la qualité vinyle est super bien. J’adore cette plateforme de pressage.

Alors, vous ne vous occupez pas de la masterisation ?
Non non. Je travaille avec des gens très talentueux. Il y a plusieurs personnes en Suisse à qui je fais appel pour les disques plus puissants, et puis Eric Merz pour ce qui est blues, lui, il travaille vraiment bien le son. Il n’y a pas tant de vrais bons masteriseurs, peut-être une dizaine sur terre, et il faut les trouver, et ça c’est dur.

Donc l’enregistrement et la masterisation, ce sont des étapes très importantes pour toi…
Absolument. Ça peut être un groupe très trash, peu importe, mais je veux vraiment obtenir un disque qui déchire tout. Tu vois, quand tu le mets sur la platine et que là il se passe quelque chose, tu es assis dans une pièce et tu es tout à coup transporté complètement ailleurs, c’est ça que je veux faire. Mais c’est aussi beaucoup de travail. Souvent on se prend beaucoup la tête avec les musiciens sur l’enregistrement. Avec Delaney, par exemple, cela peut durer des mois. Des mois de discussions… sur ce que je n’aime pas, ce que lui n’aime pas… c’est tout un processus. Le réenregistrement par exemple, que ce soit dans un studio ou à la maison, une chose en amenant une autre, cela me prend en général entre un et deux ans de travail avec un groupe, pour un disque. C’est vraiment beaucoup de travail (rires). Et je peux vraiment être très chiant avec les musiciens, je tiens d’ailleurs à m’en excuser auprès d’eux. Je suis désolé d’être aussi chiant. Mais je pense qu’au final on obtient toujours quelque chose qui nous plaît vraiment.
Et pour les couvertures d’albums, c’est la même chose ?
Oui, la même chose. Encore une fois je m’excuse auprès de tous mes musiciens. Si ce n’est pas absolument parfait, je peux vraiment devenir très chiant (rires).

Est-ce que tu travailles avec des designers ou bien tu fais tout toi-même ?
J’en fais la plupart moi-même. Mais après, ça dépend si ça plaît aux groupes ou non. Sinon, il faut qu’ils fassent une autre couverture, ou alors ils trouvent un artiste avec qui je dois travailler et souvent, soit je le vire soit je le pousse vraiment dans ses retranchements. Je peux vraiment, vraiment être tellement chiant ! Ce n’est pas de la méchanceté ou quoi que ce soit, c’est seulement que je veux créer le meilleur produit sur la planète. Bon, ce n’est que mon humble opinion, peut-être que ce n’est pas la meilleure production sur la planète. Mais j’essaie toujours de faire au mieux que je peux. J’essaie de progresser…

Écoutez l'émission avec sa playlist sur Casbah-records.com

English version

Who was Lightning Beatman?
Lightning Beatman was my alter ego. I’m Beatman Zeller from Bern, Switzerland. In the 80s and 90s I was in Los Angeles and I discovered Mexican wrestling, so I bought myself a wrestling mask and went on the stage as a one man band, fought against myself and always won. (laughs) But the mask took his personality after me and it got a bit crazy, I lost my voice, and after ten years of Lightning Beatman my whole body was destroyed so I had to change the name to Reverend Beatman.

So… How and why did Lightning Beatman become Reverend Beatman?
Well that’s why. This character, Lightning Beatman was just too evil, too sick and I had to get rid of it. (laughs)

Does Reverend Beatman have a special mission on earth? With music?
Yeah, it’s love. (laughs) I love love. It’s the best.

So, Lightning Beatman, Reverend Beatman and Beatman Zeller, are they different characters?
They are all me. Everybody has a lot of different characters in themselves. Onstage, I find out which one is the character I want to show, so all those characters are in me, I let them out on the stage, but it’s all me.

So you don’t want to use your wrestler mask…
I don’t need to hide behind a mask anymore. It’s really easy to put the mask on, you can explore yourself in different ways, but at the same time never explore yourself. It’s an amazing experience to hide behind the mask and go freak out, get naked... I would never do that without the mask. Now, I don’t need the mask anymore.

Now, about the label Voodoo Rhythm Records, when has the adventure started?
It started also in the mid-80s, when I was working with a record label and record shop called Record Junkie. I already had a little pirate tape. I learned about running a label in the mid-80s with the Record Junkie Records, then in 1992 I made it more professional with the Voodoo Rhythm Record Label. 

What is your stance about supporting small bands that will never be profitable?
That’s exactly that. When I was on tour in the 80s, 90s I saw so many bands that couldn’t find a record label. And I wanted to have a record from that band in my record collection, because I’m a record collector so… The only way to have a record from that band in my record collection is to make a record of that band. So actually I started to make the label because I wanted to have records of those bands I love so much. And that’s what I still do! I get demo tapes and I see bands, other people say “oh my god this is too crazy” and I normally do it. (laughs)

That’s actually in my next question:  does Voodoo have some sort of guideline, like one man bands, European, trash blues… or is it mostly based on encounters?
My guideline, I think, is no guideline. The honesty of the bands, I think that’s the line, they’re all good people and they all write great songs but then the music style, I don’t care, if there are 10 people in the band, or only one person in the band, or if they make jazz or rock or punk or blues, I don’t care, if it’s good then it appeals to me and I want to make it. It’s kind of like being in a flea market, searching for something, at first you don’t know what you’re searching for and you find it and you just have to have it. It’s the same.

I suppose you have many people coming to you and asking you if you want to release their album?
Yeah, many people come.

And does it work?
Yeah, sometimes it works, but it’s really hard because I don’t want to disappoint anyone. If someone starts playing the guitar and recording their own music, that’s already an amazing step! It’s really hard for me to tell them that I won’t release it on Voodoo Rhythm Records, even if I think their music is great! For me that’s the hardest part in running a label. And I don’t know exactly what kind of records I put out, it’s a feeling I have inside, you know, it’s not my brain telling me to make a record of this musician, it’s something else, I just have to do it. If this feeling comes out, I do it, it’s not something personal against or in favour of the musician, it’s just that I have to do it, it’s my passion.

Does Voodoo want to get bigger?
Oh yeah, we do, totally! Bigger is better you know (laughs)! We like where we are at the moment, but I think that there are so many people in the world, you know, that’s trillions of people. And what the mainstream music is bringing them, it’s just not creative, it brings people nowhere. I want the music to be creative, to be different. When you put on the radio it’s always the same ten musicians 24hours a day! There’s so much different music in the world, from Africa to Arabia, to America, Switzerland, France etc. Everybody does different music and they are so good, they write such good songs! Why don’t they get played on the radio? This would open the mind of every person in the world! This would change the whole world for ever, if this music was heard by a lot of people, and if these people were interested in that music. Our brain is so big, we can take so much, and they only give us so little, it’s not fair. (laughs)

What are Voodoo Rhythm Records’ future releases?
At the moment, it’s the new release of Hank Haint, an English one man band, it’s brilliant. No, it’s like, super brilliant. Then in September we have Becky Lee & Drunkfoot she’s a girl from Arizona, it’s a one woman / girl band and she’s just like amazing. When you hear all the blues guys, it’s very man dominated. Then comes this woman from Arizona (Tempee Arizona) and she’s just a whole orchestra. Blues, kind of desert blues band. It’s amazing also the songs she sings, what she writes about, they’re all crazy stories from her life. She has a crazy life story, it’s all in her music, it’s really beautiful. In October we’re going to have the Heart Attack Alley, it’s a band from New Zealand, it’s two girls and one guy, it’s also kind of a bluesy band and it’s also really good.

A few years ago, you had problems with the SACEM, Voodoo Rhythm was about to close down, can you tell us about this episode and the solidarity it provoked around you?
I’m a small record label, like a lot of other small record labels and you have this royalty policy: SACEM, SUISA etc. A lot of copyright companies which is actually a good thing, they stand behind the musicians, they care about them. But I paid so much money to those companies and the bands never got the money and I was getting kind of pissed off, so I stopped paying them and I gave the money directly to the bands, without going through the copyright companies, and instead of money I gave records, I gave them a lot of records that I played. So, that was good for me and it was good for the bands and of course the copyright companies didn’t like that at all. So they sued me for like 50 or 60 thousand bucks, and I couldn’t pay it. So I wrote on the internet “please help, I have to close down Voodoo Rhythm Records”. People from all over the world sent me money and made benefit concerts, and in the end I could pay! It’s amazing. If you create a label, you’re sitting behind your computer and you can’t imagine how much contact you can get with the people who are buying the records. And if you do something like that you get so many reactions, it’s just amazing. We realized that we were doing something that maybe the people really liked. They like that we are doing something different, that it’s not just one style but many styles and the music is different, it’s strange… It was really helpful. But now, we pay the money, we’re working really close with SACEM and SUISA together to change the whole system. We want the musicians to be the priority of those companies. Not only the top 100 or the top ten musicians, they get the money, we want that all musicians, the little guys who play like 300 shows a year, that they get the money, that’s what we are fighting for at the moment.

How is your claim received by the SACEM in Switzerland?
Well, SUISA is working really close with us, they also want to change, they see the problem. They’re like “ok, we see that there are so many musicians and that they don’t get the money, there is so much money and we don’t know where it’s going… how we could change the system.” I think the whole system has to be rethought. So many musicians and so much money around… You’re always paying the SACEM, but who gets that money, where does the money go? I want that bloodshot bill gets the money as well you know, everybody, Delaney Davidson! It’s just not fair that DJ Bobo and Manu Chao get the money. I’m not saying that Manu Chao is the same as DJ Bobo (laughs). I love Manu Chao (laughs).

Now about The Monsters? Why did The Monsters get back together?
We never split up! (Jordane laughs and apologizes). We started in 1986, and we just kept on going. In the beginning we were doing a lot of shows and tours, and then, POP, I got a kid, POP, I got a second kid, then the bass player got a kid, the drummer got a kid… It’s a lot of kids! It’s really hard to deal with that, you know you don’t want to get the women upset, so… (laughs) So we have to arrange things and see priorities. The Monsters always were a priority, we have always had a rehearsal day a week so we could get together, everyone in the band is from a different town but our band is based in Zürich. That, and the tours, there has always been a lot of organising to do. I’m having a lot of fun with the Monsters, it’s my favourite band to play with.

The Monsters are a reference, here in Europe. Are you surprised to hear that?
Yes, I’m really surprised! (laughs) It’s just trash punk we’re doing it’s not like top 100 music. I’m always surprised that the people like us.

Can you explain it?
No, it’s a mystery (laughs). I have no idea why (laughs). We can’t play, we can’t sing, we can’t do anything. They like it, that’s good!

But, you play music with your heart!
You can be terrible even if you’re playing with your heart.

Can you tell us about Die Zorros?
Oh, that’s one of my favourite bands. And nobody likes that band. It’s the worst selling band on the label. I play drums on that band, it’s so much fun, it’s so chaotic, the live shows... We never rehearse, and even for the studio we don’t even have songs, we don’t rehearse, we don’t do anything. Before a song, anybody can choose one, and then we just play something. It’s a lot of fun, a lot of fun, really good band.

Do you have other things to come? Other bands...?
No, I think that’s it. In the past I always had a lot of bands, but now my three bands are Die Zorros, The Monsters and Reverend Beatman. 

Just a few questions about how you record your vinyls: you know we also have a label, and we think you’re quite at the top. What kind of material do you use to record?
It varies. We can record digital, analogue... I try to work with good studios that I already know, there are many good studios. There are some in Italy, there is Star Track in Switzerland, Toe Rag Studios in London. I like to work with good engineers, people I know who know about the sound. That’s the first step of recording, and the second step is the mastering process: you have the final recording and you give it to the mastering guy, that’s something completely different and they are quite expensive. I also work with a couple of different mastering guys together. And after that is the coding process, which is also a very important process. After the mastering you can press the CD, but if you want to make a vinyl record you need a good code. So we have in Bern a pretty good codage the Centraldubs, or in Czech Republic there is at the moment a really good coder, I love this codage, he makes a really good code on the vinyl it’s very loud and the quality is very good, and the vinyl quality is very good, I like this pressing plate a lot.

So you don’t do the mastering yourself?
No. I really have a lot of great people I work with. There are a few in Switzerland for the more powerful records and then I have Eric Merz for the more bluesy stuff, he’s just opening up the whole sounds. There are not a lot of good mastering guys, maybe ten in the whole world, and you have to find those guys and it’s really hard to find them.

So, the recording and mastering stages are important for you...
Yeah. It can be a super trash band, I don’t care, but I want to have a record that blows my head off. You know, when you put it on and then you have something, you’re sitting in a room and it just takes you away to another place, that’s what I want to do. But that’s also a lot of work. Sometimes I argue a lot with my musicians about the recording. With Delaney for example, it can sometimes be months of arguing about what I don’t like, what he doesn’t like, it’s a whole process you know. Re-recording and stuff, you go to the artist’s studio, make home recording, you do that and you do this, a record normally takes me from 1 to 2 years worth of work with a band, for one record. It’s a lot of work. (laughs) I can be a real pain in the ass for the musicians, I apologise to my musicians for being a pain in the ass. But I think in the end we have a product we really like. 

What about the album covers and artwork, is it the same thing?
Yes, it’s the same, I apologise to all my bands again. If it’s not super perfect I can be a real pain in the ass. (laughs)

Do you have designers you work with or do you do it all yourself?
I do it mostly myself. But you know it depends if the bands like it or not, otherwise they have to make another one, or they can bring a graphic artist and I have to work with the graphic artist, or fire him or push him so that he goes to the limit of what he can do. I can really, really, be a pain in the ass. It’s not that I am mean or anything, it’s just that I want to have the best product ever made on this planet. But that is only my opinion you know, maybe it isn’t the best product ever made on this planet. But I always try to go a little bit higher. I try...

mercredi 14 novembre 2012

REVIEW II / Novembre 2012

 The Future Primitive (Groovie Records, 2012) - EP unreleased

Un peu d'exotisme dans cette période automnale qui commence à sentir le feu de cheminée pour ne pas dire le sapin. Deux questions me hantent à l'écoute des Future Primitive : Comment un groupe de mec de 20 ans avec la morve au nez peut jouer une musique sixties garages aussi fidèles aux origines ? L'autre question qui s'impose est : Pourquoi les Sud Africain font du garage américain plutôt que de johnny Clegg ?
Peut-être que les Future Primitive sont la quintessence de ce que l'on appelle la mondialisation ou l'abolition des frontières tant géographiques et temporelles a été démultiplier par la toile (le web). Hyper fidèle, le trio de Cape Town sonne Lo-Fi par obligation (leur EP a été enregistré dans un garage en prise live avec un micro d'ambiance branché sur un Fostex 4 bandes) mais propose un véritable hymne aux sixties. Bien que ce premier jet 6 titres soit parfois un peu brouillon, il recèle quelques perles comme "Try on something really you"



Notez que leur première démo est pour l'instant gratuite mais que cela ne devrait pas durer car le groupe vient de signer sur le label portugais Groovie Records, spécialiste du genre. Quand on vous parle de mondialisation !!




Mujeres (Sones Records, 2012) - Soft Gem

On reste en prise avec la mondialisation pour cette seconde belle découverte. Les Mujeres sont catalans et jouent du rock'n'roll mieux que les ricains. Lorsque Soft Gem, leur second LP, est arrivé sur ma platine autant dire qu'il ne l'a plus quitté d'un mois. Après une écoute mono-maniaque de ce quatuor barcelonais, je décide donc de partager mon plaisir. Elevé au grain et à la fuzz, biberonné par les Sonics et certainement fan des Beattles (Sic!), poussé au cul par les prémisse d'un revival garage venus de la cote est sous la houlette médiatique de la nouvelle sainte trinité du rock'n'roll : Black Lips, Ty Segall et Thee Oh Sees, motivé par l'idée de rester ensemble après leur école de cinéma, les Mujeres ont décidé de prendre les instruments pour faire du rock.Avec Soft Gem, ils ont réussi à absorber les multiples influences pré-cités tout en conservant cette chaleur latine. Album éclectique, sorte de condensé de surf, rock, pop garage.


 
Les Mujeres profitent de la vague garage lancée par le succès des Strange Boys, Goodnight Loving et consort pour se faire leur place au soleil et sur vos platines.





dimanche 4 novembre 2012

Becky Lee And Drunkfoot - Hello Black Halo (Voodoo Ryhthm Records, 2012)



Becky Lee c'est une fille comme seule l'Amérique sait en imaginer. Une histoire digne d'un scénario de Quentin Tarantino pour débuter dans la vie (d'après ce qu'on en dit) et puis un drunkfoot pour continuer la route, cahin caha. Le pied, ça absorbe moins l'alcool que le foie, ça peut servir d'ami imaginaire, tout alcoolique qu'il puisse être, et c'est surtout bien pratique d'en avoir au moins deux quand on décide de se la jouer one woman band. Becky lee et son DrunkFoot sillonnent inlassablement les routes et dispensent leur blues Rock'n'roll déchiré d'amour. Premier album officiel Hello Black Halo annonce bien la couleur : noir, comme ton moral quand ton bien aimé t'as quittée, virée, trompée ou même bâchée. Heureusement qu'elle a son Drunkfoot Becky, ils ont l'air bien tous les deux, et en tout cas, ils sont bien synchros, ça c'est le moins qu'on puisse dire. Ecouter l'album et se laisser porter par la rage, faire du air guitare inconsidérément et chanter à tue tête les refrains que tu gardes des journées entières, c'est une chose, mais voir Becky et son Drunkfoot s'adonner à leur activité favorite, c'est juste impressionnant. Tu te vois toi, d'une main gratter ta guitare avec une baguette coincée entre les doigts, de l'autre te balader sur les accords de ta gratte, pendant que ton drunkfoot bat le rythme, que ta première main frappe la cymbale ou la caisse claire, alors que pendant ce temps là tu chantes (juste), et que ton autre pied (et oui tu en as deux, autant ne pas le laisser s'ennuyer tout seul dans son coin) lui aussi bat le rythme... Moi, je ne m'y vois pas.

 Les one woman band il y en a peu à travers le monde, il faut dire que l'exercice n'a pas l'air des plus aisés, je ne vais pas vous refaire la démonstration, non. Hello Black Halo tourne en boucle sur ma platine, c'est un bijou où rien n'est à jeter, l'accomplissement après des dizaines, voire des centaines de scènes écumées, l'écrin qui reçoit le nectar de cette songwriter, à ne rater sous aucun prétexte. Parce que Oui, Becky Lee compose, écrit et interprète, un joyau vous dis-je. D'une sacrée trempe il faut s'armer pour s'afficher comme ça, seule sur scène, guitare et drum kit pour seul présence, et balancer tes compositions Blues Rock'n'roll, Respect Becky.

Découvrir d'autres one whoman band : Molly Gene one Whoaman band et The venus Fly Trap one girl band, entre (peu d') autres.

samedi 3 novembre 2012

REVIEW I / Novembre 2012

WALL OF DEATH (Born Bad Records, à sortir 19 Novembre 2012) - Main Obsession
C'est l'histoire d'un groupe qui a été épaulé par les très adulés Black Angels, groupe ricain en tête du mouvement psyche-revival rock. Nous ne nous arrêterons pas là, et n'insisterons pas plus sur ce soutien mérité et évident. Wall of Death sort en effet sur Born Bad un album plutôt passionnant, dans lequel le rock psychédélique initié par les Pink Floyd, 13 th Floor Elevators, Velvet Underground ou autres plus éloigné Hawkind est largement à l'honneur. De ces compos envoûtantes, à la légèreté transparente ressort une certaine pureté, que d'autres morceaux parfois un peu plus stoner viennent habilement contrasté de sombre. Cette sortie sur Born Bad records ouvre l'axe du catalogue du label le plus hype du moment, ce qui n'est pas sans nous déplaire. À écouter seul pour rêver de cosmos.




 BEATS FROM BADVILLE ( Stag-O-Lee records) - Vol I
Le label Stag-O-Lee Records a sorti en Juin dernier la compilation qui aurait dû nous faire danser tout l'été. Un peu cons, nous avons découvert l'objet en Octobre. « Beat From Badsville Vol.1 » regroupe des singles des années 50 et 60 collectés et stockés dans la maison de Lux Interior et Poison Ivy (vous savez, le couple qui a changé notre vie en formant THE CRAMPS). Dans le même esprit que les Cramps, cette compilation propose des morceaux d'exotica, de rock'n'roll, de doo-wop, d'étrangetés et même de surf. Bien plus qu'une compil ultra efficace, ce disque révèle toutes les productions oubliées des années 50. Tandis qu'Elvis Presley se faisait tailler un costard pour moins choquer le mainstream, une bonne bande d'attardés et de surdoués exploitait la marge de manœuvre du rock'n'roll. Cette compilation lui rend hommage.

F.MORON

dimanche 21 octobre 2012

REVIEW II / Octobre 2012

TURBO FRUIT (Serpents and snakes records, 2012) - Butter

Faire du rock sudiste qui sent le cambouis et l'huile carbonisée tout en conservant la hype New-Yorkaise n'est pas donné à tout le monde. Turbo Fruit, quatuor de Nashville, n'a rien en commun avec les Strokes et autres dandys rocks de la grosse pomme. Rouflaquettes fournies, tignasse hirsute, jeans sales et cuir élimé, ces mecs pourraient être les cousins des "Lords of Altamont" en moins violent. Et pourtant à l'écoute de Butter, leur 3ème opus sur le label Serpents and Snakes Records la comparaison avec les minets de New York n'est pas si absurde. "Harley Dollar Bill $", "Sweet Thang" ou "Colt 45" flirtent avec le meilleur des Strokes et nous pouvons prévoir au Turbo Fruit un avenir survitaminé .Bien entendu, la casbah a une préférence marquée pour quelques titres plus échevelés et énergiques telle que "Gamble Tamble", "Ain' t the only one have fun" ou "Dont like to fight". Attention la tante Irma du rock à l'écoute de Butter a détecté quelques mauvais signes. "Catch and release" ou "Gotha get away" laisse présager un prochain disque aussi pourri que la tournure de carrière des Kings of Leon. Alors aimez-les maintenant ou jamais !


BLACK PISTOL OF FIRE (Rifle Bird Records) - Big beat 59'

Le blues à deux, c'est mieux. Alors que Left lane cruiser est en train de faire oublier le tournant rock de stade prit par les Black Keys, d'autres duo batterie/guitare tentent de faire revivre la flamme de RL Burnside. Le duo canadien des Black Pistol of Fire s'était déjà fait remarquer en convoquant les esprits du Creedence Clearwater Revival ou de Led Zepelin l'année dernière avec un premier opus éponyme remarqué par la presse spécialisée. Kevin McKeown virtuose de la guitare alignait les riffs énormes tout en posant des solos fins et efficaces (comprenez court) soutenus par le jeu de batterie fin et varié d'Éric Owen. Big Beat 59 arrive donc six mois plus tard pour confirmer l'essai voire même de laisser entrevoir derrière ce mur de son une certaine finesse. L'ouverture du disque avec Beelzebub et Strips ou Keys nous laisse pantois face à l'armada sonore déployée. Mention spéciale au jeu de baguette d'Éric Owen qui rythme à merveille le disque. Oeuvrant à la marge d'un blues garage traditionnel et d'un rock sudiste agressif, les Black Pistol of Fire livrent un disque sans beaucoup de surprise par rapport au précédant mais tout aussi jouissif pour les fans de la première heure des White Stripes et Black Keys. La voix est omniprésente et parfaite. Vous l'avez compris Big Beat 59' ne révolutionnera pas le genre mais s'inscrit dans la grande famille des duo Blues Garage Américain orphelin de leur père (Black keys) et mère (White Stripes).



CROOKED BANGS (Western Medical Records) - S/T

Comme il est hors de question de publier une chronique sans un groupe d'Austin, nous avons opté pour ce mois-ci pour les Crookeds Bangs. Jeune trio de punk intello qui sévit sur le label western Médical records, les Crooked Bangs proposent un post- punk mêlant des titres chantés en français et en anglais. Les Crooked Bang, c'est presque un groupe de fille, c'est presque un groupe de punk et c'est presque un groupe francophone. La langue de Molière n'est pas évidente à maitriser ce qui pose quelques problèmes de rythme à la chanteuse / Bassiste, Léda qui sont vite oublié tant la guitare de Samantha et la batterie millimétré de Phil el fantasmo assure. À noter quelques riffs bien sentis sur les titres "sois jeune" et "Lucifer, mon amour".




mercredi 10 octobre 2012

REVIEW I / Octobre 2012

THEE OH SEES (In the Red Records, 2012) – Putrifier II

Qui peut suivre les Oh Sees ? Sûrement pas toi, sûrement pas nous. Petit récapitulatif, sur l'année 2011 -2012, Thee Oh Sees ont sorti 3 albums. Trois surprises, trois tartes, trois effets kiss cool au LSD. Thee Oh Sees, c'est ce groupe formé par John Dwyer, hyperactif californien bien connu dans l'underground garage, constamment sous weed et constamment en tournée. Pour cette album Thee Oh Sees réussissent encore le pari de nous surprendre. Bien que l'album n'est pas à tomber par terre de nouveauté, il reste quand même cette arrière goût de batte base-ball derrière la nuque, en témoigne le morceau introducteur « Wax Face ». Délires psychotiques, relents psychédéliques des anciennes décennies, garage moderne surpuissant, la recette est un peu toujours la même, mais Thee Oh Sees réussissent toujours à aborder le sujet d'un nouvel angle. Putrifiers II présente d'ailleurs des morceaux plus posés et attendris, qui rappellent parfois l'état d'âme d'un Velvet Undergound. En tout cas, toujours est-il que si vous n'accrochez pas à cette album, il ne vous reste qu'à aller voir les Oh Sees en live, et vous agenouillez pour demander pardon.


TOTAL CONTROL – Henge Beat (Iron Lung Records, 2011)


En 2011 sortait un album que nous avions complètement zappé, voir ignoré. Total Control sortait un album révérencieux et audacieux. Dans une veine clairement fin 70, inspiré d'une Europe sur laquelle un froid industriel se répandait, Total Control touche à la cold wave, au krautrock, au punk. Loin d'un copier/coller basique et fade, la formation Australienne redonne vie à un rock synthétique et électrique. Ainsi, c'est avec grandeur que "Henge Beat" nous promène entre des morceaux à la Suicide (See More Glass), des hommages à Kraftwerk (The Hammer), sublime, des chansons punks édifiantes ou des récitals ultras sensible à la Joy Division (Carpet Rash). La qualité première de Total Control est d'avoir su, sur cet album, donner une voix marquante à la mélodie, tout en conservant une énergie débordante. Un album d'une grande qualité, sans surprise vu qu'il a été écrit et composé par des membres d'Ultra Vox et Eddy Current Suppresion Ring.



F.MORON

vendredi 28 septembre 2012

REVIEW I/Septembre 2012

THE HEX DISPENSER (Red lounge Records) - 45T - Parallel

Le combo punk d'Austin mené par Alex Cuervos qui entame d'ailleurs une carrière solo, vient de commettre pendant l'été un 45t intitulé "Parallel". Connu sur la scène garage notamment grace à sa collaboration avec Mick Collins des Dirthbomb, Alex Cuervos continue de tracer une autoroute punk mélodique imparable avec The Hex Dispenser. "Parallel" est sortie sur le label Red Lounge Records. Il comporte 3 titres dont une reprise des Misfits. Rien de bien neuf, le groupe propose le même punk mélodique alliant l'efficacité "blitzkrieg" des Ramones et le sens pop des Buzzcocks. À noter le titre imparable "Young Blood in the river"


DIKES OF HOLLAND (Screamer records) - Brainded USA


Toujours D'Austin, ce quintet punk commet son premier LP "Brainded USA" sur le label parisien Screamers Records (dont il est la première référence). Joli coup pour ce jeune label à qui l'on promet une belle carrière. Repéré par de nombreux amateurs lors du SXSW d'Austin, The Dikes of Holland concrétise les attentes avec ce brulot de 12 titres qui combine la hargne du punk (kinky parent, dirty san franciscan) aux riffs brûlant du hi-energy (Rotten Taste, Brainded USA). L'album s'ouvre sur le splendide streetwalker qui n'a rien à envier au meilleur titre de Mark Ryan des Marked Men, riffs propres et efficaces sur une mélodie entêtante que l'on beugle avec plaisir. Les titres s'enchainent, alternant des offensives quasi hurlées par Liz Burrito et des couplets bondissant soutenue par une batterie garage.



ALLAH LAS (Innovative Leisure) - Allas Las


Ces jeunes kids de Los Angeles ont de l'or entre les mains et viennent de signer sur un label qui sait y faire pour bonifier voire internationaliser ses poulains. Le succès leur ouvre les bras lorsque l'on sait qu'Innovative Leisure à déjà propulser Hanni El khatib et Nick Waterhouse au sommet des charts. Les Californiens sont marqués au fer rouge par la surf musique qu'il colore de beats sixties et mod's anglais. Repéré par une simple sortie en 2011 dans lequel il jouait le joyau "catamaran" (on le retrouve en ouverture de l'album) produit par Nick Waterhouse, Allah Las faisait buzzer les blogueurs qui attendaient avec impatience ce premier LP. Coup de maître, ce premier disque fait mouche et commence à faire frémir la presse internationale d'autant plus qu'ils partagent une tournée dantesque avec Mr Waterhouse nouvelle coqueluche des nostalgiques d'ampli à lampes, de gomina et de maccarthisme. Bien que moins convaincu par l'intégralité du disque (parfois trop pop guimauve à notre goût) la casbah aime Allas Las qui ravira les fans des Beatles et Beach Boys.





THE FEARLESS VAMPIRE KILLERS (Unsigned) - Batmania
 

Ils viennent de Melbourne, ils sont quatre et proposent un rock'n'roll folk cinématographique. Après un premier album "batmania" sortie l'année dernière en autoprod, les Fearless Vampire Killers n'ont toujours pas trouvé de label. Ils reviennent donc à la charge avec l'excellent single Mexico qui vous emmène dans l'univers de Tarantino, une musique de Western Spaghetti habitée et fantasmagorique.




dimanche 9 septembre 2012

Movie Star Junkies - Son of the dust (Inside/outside records, 2012)


J'aime les univers. Un trou de serrure d'où jaillit un filet de lumière qui attise la curiosité. Les engrenages qui nous entraînent dans des mondes riches. On regarde par l'orifice et on ose ouvrir la porte pour s'abandonner dans les pensées d'un autre. Nous ne sommes que des convives mais notre hôte est généreux et nous offre sur un plateau des émotions que notre quotidien souvent millimétré peine à nous donner. Au même titre qu'un Tolkien ou un Ellroy en littérature dans la même lignée qu'un Lynch pour le cinéma, les Movie Star Junkies (MSJ) sont des créateurs d'univers musicaux. D'album en album, ils construisent leur édifice aussi fou et improbable que la Sagrada Familia de Barcelone. De plus en plus riche, leur musique touche à chacun de nos sens et peu selon les humeurs accompagnées avec fidélité nos errances immobiles, les yeux dans le vague. Quelque soit votre sentiment, vos goûts, un album des MSJ ne peut pas décevoir. Peut-être qu'il vous exclura, vous laissera sur le bas-côté mais ceci est une autre histoire. Incomparable ! Je ne peux pas donner de filiation aux Italiens tant ils ont creusé leurs propres sillons.
Né en 2005 de la rencontre de Stefano chanteur et organiste avec Caio Batteur sur un concert des cramps, ils donnent naissance à la première forme des MSJ. Le groupe va rapidement accueillir Vincenzo à la guitare, Alberto à la guitare fuzz, contrebasse et Emmanuele à la basse. Nécessité impériale face aux ambitions musicales du combo. Rapidement, ils sont donc cinq à bord de ce bateau ivre sans tête ni capitaine mais qui tient le cap. Tout commence par une poignée de 45t sur différents labels (fistful of records, Hell yes !, Primitive records) entre la période de 2006 à 2008. Les MSJ s'offrent au monde avec « Melville » sorte de blues maritime et dépressif enregistré dans le vrombissement des moteurs. Directement inspiré de l'écrivain Herman Melville, l'album évoque des naufrages et des passages de la vie de cet auteur énigmatique du 19ème siècle. Lo-Fi, on sent déjà une écriture, une composition riche derrière les larscenes. « A poison tree » deux ans plus tard marque une nouvelle évolution pour le quintet qui s'oriente vers un folk sombre et fantasmagorique. Le son s'est adouci pour laisser entendre le talent génial du quintet. The Mariage Of Heaven And Hell de William Blake est la source d'inspiration du combo. Ils reviennent donc en 2012 avec « son of the dust » sur le label « inside/outside records » fondée par Matteo Bordin des Mojomatics et Emanuele "Nene'" Baratto, le bassiste du groupe. Plus question de Lo-Fi sur ce 3ème opus, les MSJ nous proposent un disque très propre, riche et fin. Oeuvrant dans les univers cinématographiques du capitaine Achab à la poursuite du cachalot blanc en passant par les silences oppressant d'un duel au colt dans une rue balayée par le vent, « Son of the Dust » nous invite à écouter l'histoire de ce fils de la poussière. Avec Les MSJ le lien entre littérature et musique est ténu, ce nouvel album nous raconte une histoire complète, chaque chanson correspondant à un chapitre.


Une grande place est laissée aux voix que ce soit le chant très clair et mixé en avant ou la profusion de chœur qui soutient assez systématiquement les refrains. Les instrumentations sont ciselées riches au service de l'histoire de ce fils de la poussière.
Un disque a se procurer rapidement et un groupe à voir en concert.

Date de tournée française :

20/10 CAVE A MUSIQUE, Macon, France
22/10 I BOAT, Bordeaux, France + Magnetix
23/10 STAKHANOV, Nantes, France
24/10 MONDO BIZZARRO, Rennes, France
25/10 L’OUVRE BOITE, Beauvais, France
26/10 LE CLACSON, Lyon, France
27/10 MAINS D’OEUVRES, Paris, France
31/10 GIGORS ELECTRIC, Gigors, France
01/11 ROCKOMOTIVES, Vendome, France
02/11 L’ASTROPHONE, Metz, France

Site web pour aller plus loin :
http://www.moviestarjunkies.com
http://www.outsideinsiderec.com

vendredi 13 juillet 2012

INTERVIEW : Urban Junior - Two Headed demon (voodoo ryhthm records, 2010)


Les arrivages Voodoo Rhythm Records sont un moment attendu par tous les fans de garage. Un des rares labels qu'on achète les yeux fermés sans connaitre l'artiste tant les principes qui le guident sont inamovibles. Garantie d'une belle découverte garage blues ou rock, je suis donc un peu surpris en posant la galette de Urban Junior "two headed demon" sur ma palatine.
Des machines!
Urgence, Lo-fi, bordel organisé mais sonorités technoïdes voir dance-floor. Ce n'est certainement pas le rythm'n'blues des années 50 qui a bercé les oreilles de ce suisse allemand mais bien le début des années 90 et l'émergence du Hip Hop. Le pire, c'est que cette rencontre improbable fonctionne. "Two headed demon" arrive à faire bouger les foules malgré une esthétique trash-punk. Grand réconciliateur, Urban Junior mériterait d'être programmé en boîte de nuit. En attendant, il se produisait dans le cadre du big tinnitus festival à Lyon en novembre 2011, organisé par le Trokson et le Clacson. Benjamin l'a rencontré et grand seigneur on vous livre tout ça.

 
Qui est Urban Junior, et quoi de neuf sur ton projet?

Je n'aime pas trop le mot projet, quand j'ai commencé c'était une sorte de projet. Je jouais à des soirées où je faisais le jukebox, le public pouvait réclamer n'importe qu'elle chanson, je la jouais. J'ai commencé avec une guitare, une grosse caisse et une caisse claire. Je jouais à des soirées ou l'entrée était gratuite, c'était juste des soirées. Et je sais pas, ça a plu aux gens et c'est devenu de plus en plus gros, j'ai enregistré quelque chansons et ça ne s'est jamais arrêté. Moi même parfois je suis encore très surpris de voir jusqu'où je suis allé avec ce truc.


Tu ne fais pas partie de cette génération d'artistes qui s'est fait connaître sur le net ?

Bah ces trois dernières années, j'ai laissé tomber ces plateformes de réseaux sociaux. J'ai dû passer trois, quatre ans sur Myspace, à surfer des heures dessus et franchement je n'ai pas envie de recommencer (rires). Tu sais c'est sympa, fin septembre début octobre j'étais en tournée pendant trois semaines et j'ai lu sur le Facebook de quelqu'un un message réclamant que je rejoigne Facebook (rires). Mais ce n'est pas mon truc, je préfère tourner, jouer, j'aime voyager, rencontrer des gens.

Est-ce que c'est justement tes débuts à des soirées privées, où tu devais faire danser les gens, qui t'ont donné envie de mélanger des sons garage, rock et électro?

Non, non ils dansaient déjà avant que je joue le micro-corde... En 2006 j'ai fait quelques concerts en Allemagne avec John Schooley One mande Band, aussi sur Voodoo Rhythm, il était aussi en quelque sorte le guitariste rythmique pour R. L. burnside en tournée. Et c'est un homme très sage, qui joue de la guitare comme un dieu. J'ai beaucoup aimé me plonger dans ce vieux blues mais tu sais je suis très mauvais à la guitare et j'étais incapable de jouer toutes superbes mélodies blues, et quand je tournais avec John Schooley, je me demandais justement quelles étaient mes racines, tu vois. Je suis né en Suisse, dans les années 80 et gamin j'écoutais ces trucs genre RnB... Alors ouais ça a juste été une idée comme ça au début de jouer avec un clavier, et mélanger ces styles un peu discos beat, j'étais un grand fan de trucs comme les Beastie Boys, qui étaient quelque chose de complètement différent que ce blues dont on parlait. Tu vois j'ai essayé de mettre les deux ensembles, de les compléter.


Ta musique est plutôt instinctive, très directe pourtant elle semble être le résultat d'un acheminement très réfléchi, c'est difficile de penser à ce que tu joues, à savoir ou tu veux aller quand tu joues tout seul ?

Je n'y pense pas... hum... Tu sais, beaucoup des chansons que joue en studio, je les invente dans le studio. Je travaille maintenant avec... deux amplis, la guitare et le clavier et j'aime ça parce que ça sonne comme un groupe tout entier. Mais d'un côté, en tant que One Man band tu te dois de rester très spontané. Tu jouais des fausses notes, c'est ça qui fait qu'un One Man band est quelque chose de si particulier. Si le public peut l'entendre. Je ne joue pas avec beaucoup de samples. De mon coté j'essaye vraiment de rester le plus spontané possible. Parfois c'est dur.


Comment ça s'est passé quand tu es passé de la scène au studio ? La scène reste le format le plus adapté pour un one man band, comment tu t'en es sorti ? Les deux sont complètement différents.

Oui en effet. Bah quand je travaille dans le studio, 99% des morceaux sont enregistrés sur une prise.
Je vais en studio, j'ai des idées de paroles et je commence à jammer. Tu sais j'écris des chansons plutôt simples... j'essaye de faire confiance à mes sentiments. Mais bien sûr en studio c'est dur de recréer cette atmosphère live. En concert les gens sont là pour te voir, c'est un cauchemar pour tes yeux d'ailleurs, tous ces gens qui te regardent. Mais c'est ce regard qui fait que les gens ne sont pas obligés de t'écouter, tu n'as pas besoin d'être un fan de ce one man band, ou du genre de musique qu'il joue mais tu es juste sublimé par tout ce que ce mec arrive à faire tout seul. Tu sais il m'arrive encore de jouer les chansons que les gens réclament comme un jukebox, mais ça dépend... Je fais beaucoup de concerts hors salle, j'ai joué dans des toilettes, j'ai joué sur des bateaux et d'autres trucs comme ça. Quand tu ne joues pas sur scène je pense que tu as un rapport plus direct avec le public. Mais j'aime aussi jouer sur des grosses scènes, pour des festivals avec du gros son, genre « Je vais te détruire. »

C'est quoi l'endroit le plus fou où tu es joué ?

Il y en a plusieurs... J'ai joué dans les toilettes des femmes à un festival, ou je jouais entre les gros groupes. J'ai fait la première partie d'Iggy pop and The Stooges dans un opéra, c'est plutôt dingue aussi. Une des audiences les plus dingues que j'ai eu c'était que des mecs torses nus, qui faisaient des mouvements de karaté sur le dance-floor, il n'y avait vraiment aucune fille ! Après le show ils voulaient me vendre leurs frangines... ça c'était marrant... !

Parlons de ton dernier album, Two Headed Demon sorti chez Voodoo Rhythm Records. Cet album semble marquer une nouvelle étape, un niveau supérieur au niveau de ta composition. Il est peut-être plus travaillé, plus complet. Jusqu'à quel degré cet album est différent de tes anciennes productions selon toi .

Sur mon deuxième album E-bomb, j'ai commencé à bosser avec le keyboard et je cherchais encore à travailler sur le son et l'image, sur ce mélange de l'influence électro, techno ce que tu veux avec le garage, les sixties, rock'n'roll, blues. Il y avait des chansons pas mal sur E-bomb mais aussi beaucoup de jam, le son ne collait pas vraiment ensemble. Sur two Headed Demon, j'ai trouvé mon son je pense et son image. Ces deux trois dernières années j'y ai beaucoup réfléchi et aujourd'hui je l'aime beaucoup. Je ne suis pas sûr à 100% de qui est mon public, de qui aime mon son. Je n'ai pas un public typique. Il a des gens très branchés par le côté traditionnel du one-man-band et d'autres qui adore ce mélange et ces nouvelles expérimentations. 

Est-ce que c'est lié au fait qu'à l'époque tu signais sur un gros label, Voodoo Rhythm, très reconnu dans le milieu ?

Oui, bien sur ! Je veux dire, dès que j'ai commencé à jouer, j'ai fait beaucoup de concerts avec Beatman, on était tout le temps fourré ensemble. Donc j'étais là à faire des trucs avec presque tous les groupes de Voodoo Rhythm, et partout où j'allais on me disais : « Mais pourquoi est-ce que tu n'enregistres pas un disque chez Voodoo Rhythm ? ». J'en ai parlé à Beatman, et à sa réaction j'ai bien senti que mon troisième album pourrait se faire sur Voodoo ! (rires) un jour où on était en Allemagne, on a fait une battle, Beatman et moi, et à la fin il m'a dit : « eh, tu étais plutôt bon, on peut dire que j'en ai un peu chié ! Fais-moi donc écouter tes nouvelles chansons ! » (rires) J'étais très content, car Voodoo Rhythm est un label très connu, qui a déjà signé des groupes comme King Automatic, BoB Log, Beatman... Me dire que je bosse sur le même label que ces mecs me rendent fier et m'inspirent ! Quand je pense à tout ça, j'ai l'impression d'être sur la bonne voie ! (rires)

Tu es content de la visibilité que t'offre Voodoo Rhythm au sein du réseau « underground » dont tu fais partie ?

J'ai l'impression que ces dernières années la scène « underground » a vraiment pris une ampleur considérable, notamment grâce à internet et à toutes ces plateformes d'échanges qui te permettent d'explorer plein de nouveaux trucs qui viennent des quatre coins du monde. Bien sur, pour un mec comme quoi, c'est vraiment cool de pouvoir utiliser internet pour rentrer en contact avec les gens. J'ai pu alors travailler plusieurs fois avec ... Records, un label berlinois qui sort principalement des éditions limitées et ce genre de truc. On a dû échanger des mails pendant presque quatre ans avant de se rencontrer en chair et en os ! Internet et Voodoo Rhythm, par le biais de leurs partenaires tout autour du monde, c'est une chance incroyable d'avoir une visibilité un peu partout !
Tu me parlais tout à l'heure de tous ces one man band qui se trouvent déjà sur Voodoo Rhythm, est ce que ça t'a mis un peu la pression ?
Non, il n'y a eu aucune pression, je parlerais plutôt d'une chance ! J'ai joué avec beaucoup de groupes qui étaient signés avant sur Voodoo Rhythm, et j'ai rencontré tellement de gens cools... Je n'ai jamais croisé de tocards chez Voodoo Rhythm(rires) ! Ça m'a conforté dans l'idée que je me trouve au bon endroit, à ma place. Pas de pression, pas de trucs compliqués, que du bon ! (rires)